La "Sainte Tombe" d'Arles-sur-Tech : symbiose du naturel et du surnaturel? 

10/04/2025

Depuis 1591, la "Sainte Tombe" d'Arles-sur-Tech se remplit toute seule de 300 litres d'eau pure par an, aux vertus curatives ou miraculeuses. Sauf lors des périodes de guerre. Une explication scientifique, dès 1961, semble avoir levé une partie du mystère, mais sans jamais expliquer les guérisons. Une symbiose du naturel et du surnaturel ? 

L'Abbaye bénédictine Sainte-Marie d'Arles-sur-Tech, fondée par Charlemagne et édifiée début du IXe siècle avant d'être consacrée en 1046, fascine par son remarquable cloître gothique et ses fresques du XIIe siècle. Mais, c'est bien à l'entrée de l'abbaye qu'un sarcophage sobre, protégé de curieux par une grille métallique, retient toute l'attention des visiteurs. Comment cette tombe d'époque constantinienne (IVe siècle), faite de marbre bleu de Céret taillé et sculpté. peut-il produire une quantité d'eau avoisinant les 300 litres par an? Aucune des missions scientifiques dépêchées en Vallespir n'a été en mesure d'élucider pleinement cette énigme. Certains ont parlé d'une éventuelle condensation de l'eau de pluie sans en expliquer le fonctionnement. D'autant que le liquide que l'on peut prélever lors de la cérémonie dite de « La Rodella », à la fin du mois de juillet, est d'une grande clarté. Limpide et inaltérable pour tout dire.

L'histoire`

L'histoire commence alors qu'Arles-sur-Tech était en proie à la fois à la peste, à des catastrophes naturelles et à des animaux féroces. Pour conjurer ces catastrophes, l'abbé Arnulphe décide de partir vers Rome pour demander son aide au pape. Le pape entend la supplique et lui permet de choisir parmi les reliques conservées à Rome, à l'exception de celle de Saint Pierre et quelques autres saints. Dans la nuit, durant son sommeil, Arnulphe voit en rêve deux jeunes gens qui lui disent se nommer Abdon et Sennen, et être des princes perses. Ils lui apprennent qu'ils ont été martyrisés à Rome, puis ensevelis. Ils lui disent que si il les ramenait en son pays pour les vénérer, ils feraient cesser les maux qui l'affligent. À son réveil, Arnulphe fait effectuer des fouilles à l'endroit indiqué, et il découvre deux corps intacts. Devant ce miracle, le pape autorise l'abbé à emporter les deux saints.

Arnulphe, fort méfiant de nature, craint tous les dangers et s'imagine rencontrer des brigands prêts à lui dérober son précieux chargement. Aussi, pour ne pas éveiller les soupçons, il enferme les corps dans un tonneau qu'il met dans un deuxième tonneau rempli d'eau. L'abbé prend alors la route d'Arles avec le tonneau chargé sur le dos d'un mulet. Arrivé au bord d'un précipice, le muletier, pour faire avancer son mulet, prononce un affreux blasphème. À peine exprimé, le mulet trébuche et chute avec les tonneaux dans le précipice. Malgré ses recherches, Arnulphe ne retrouve rien. Il rentre donc seul et désespéré à Arles. Aux portes de la ville, il est très surpris d'entendre les cloches sonner. Et arrivé sur la place de l'église, il voit toute la population à genoux autour du mulet et du tonneau contenant les précieuses reliques. Quelle surprise et quelle joie en voyant ce miracle ! 

Les guérisons

Les reliques avaient déjà guéri sur le parcours les pestiférés et fait partir les bêtes féroces. Arnulphe soulage alors la mule et vide l'eau de la barrique qui contient les Saintes Reliques dans un ancien sarcophage à l'entrée de l'abbaye d'Arles-sur-Tech. Un lépreux vient boire l'eau et guérit instantanément. Les moines, voyant cela, referment le sarcophage au moyen de son lourd couvercle de marbre, et commencent à puiser l'eau par un petit orifice pour l'offrir aux malades. Des ex-voto attestent des guérisons miraculeuses. Le gisant de Guillaume Gaucelme, seigneur de Taillet, mort en 1204, encastré au-dessus du sarcophage, témoigne de la guérison d'un cancer de la face par des applications de compresses imbibées d'eau de la Sainte Tombe. L'origine de cette eau reste inconnue et intarissable, excepté lors des deux guerres mondiales, où le tombeau est demeuré vide. Un autre témoignage de guérison a été donné plus récemment dans le cadre de l'émission Mystères par un habitant du village, grièvement brûlé lors d'un feu de la Saint-Jean et soigné au moyen de l'eau du sarcophage.

Aucune explication scientifique totalement satisfaisante

En 1910, l'abbé Crastre promet la récompense de 1 000 francs à celui qui éluciderait le mystère de la Sainte tombe d'Arles-sur-Tech. Cette somme fut déposée chez un notaire, mais personne n'a encore réclamé son dû. Les hommes de science ont alors émis plusieurs hypothèses et des mesures ont été réalisées.

L'une des hypothèses semble pour eux l'explication logique. Les deux parties du sarcophage (le sarcophage proprement dit et son couvercle) sont constituées de la même roche poreuse. Du calcaire de cette roche se dissout dans l'eau de pluie qui traverse le couvercle perméable. Les carbonates contenus dans cette eau se déposent sur le fond et le rendent imperméable. La porosité du couvercle permet la filtration de l'eau de pluie. Celle-ci est maintenue dans le sarcophage du fait que le fond a été bouché par des sédiments au fil des années. Le couvercle et le sarcophage ont été taillés dans le même bloc de pierre.

Des tests de perméabilité ont également été faits sur des échantillons de marbre provenant de "la seule carrière qui ait pu vraisemblablement fournir à l'époque le matériau dans lequel a été creusé le sarcophage.

Au passage, l'étude nous apprend que certaines expressions sont trompeuses. Ainsi, lorsque l'on dit ou écrit: "Le sarcophage déborde parfois", ce qui fait penser à, au moins, un filet d'eau qui coule, la réalité contenue dans cette expression est différente puisqu'elle est tirée d'un constat signé pas 10 personnes le 3 avril 1942 et qui dit: "Le sarcophage est plein, le liquide déborde, une grosse goutte tombe toutes les deux minutes sur le devant du tombeau." (le tombeau est légèrement incliné, ce qui explique le débordement en un point bien précis seulement).

La conclusion générale sur le sarcophage d'Arles sur Tech est la suivante:

"Le couvercle du sarcophage est perméable et l'eau de pluie y pénètre, met 4 à 6 jours en moyenne pour traverser la pierre et s'écoule ensuite goutte à goutte à l'intérieur. Comme il ne peut y avoir de circulation d'air importante entre intérieur et extérieur, il n'y a pratiquement pas d'évaporation et l'eau peut donc bien s'accumuler. Comme, de plus, l'eau de pluie lave et attaque même légèrement le couvercle, celui-ci reste propre et perméable, et le phénomène peut se prolonger indéfiniment." "Pourquoi alors l'eau reste t-elle dans le sarcophage puisque le corps de celui-ci est également en marbre ? Tout d'abord, la pierre n'a pas rigoureusement le même aspect, et il est possible qu'elle ait été taillée dans un banc très peu blanc très peu perméable. D'autre part, l'eau stagnante dans le sarcophage laisse déposer les moindres particules qu'elle peut contenir, et il se dépose également le peu de poussière qui arrive à passer par les interstices." (Plus de 2 Kg de boue noire ont été retirés du sarcophage en 1950, provenant d'un dépôt de 150 ans maximum; ouverture sûre en 1795 mais on ne sait pas si entre cette date et 1950, le sarcophage fut ouvert). "On peut également penser qu'un peu de poussière est entraîné par l'eau qui ruisselle sur le couvercle et pénètre entre couvercle et corps (phénomène de la "goutte pendante")... Les dépôts ont dû s'accumuler, au cours des siècles, rendant le sarcophage étanche en pénétrant dans les pores de la pierre..." La conclusion signale encore que le couvercle étant perméable, le phénomène de rosée reprend toute sa valeur, car l'eau qui se dépose sur le couvercle peut ensuite pénétrer. En résumé et comme le disait le Professeur Leborgne en présentant le travail: "Nous avons mis le doigt sur la goutte qui remplit le sarcophage."

1/ Étude de l'Association française sur l'Information Scientifique (AFIS)

Pour la deuxième fois en un demi-siècle, le sarcophage d'Arles-sur-Tech a livré son secret. Une étude menée sur plusieurs années vient en effet d'être rendue publique, confirmant ce que l'on savait déjà sur l'origine de l'eau recueillie (essentiellement de l'eau de pluie) et précisant en particulier la part que tient la condensation dans le phénomène.

Un phénomène expliqué depuis 1961

Étonnamment ignorée depuis sa publication (dans La Houille Blanche - décembre 1961), l'enquête de trois hydrologues 1, suite à des expériences et relevés effectués avec l'accord des autorités paroissiales, fournissait pourtant des conclusions claires et précises. Le fond du sarcophage est quasi-imperméable (dépôt de poussières et calcaire). Le couvercle du sarcophage est perméable. L'eau met en moyenne 5 jours pour le traverser (2 à 20 jours). 30 % de l'eau de pluie est récupérée. Il y a peu de circulation d'air entre intérieur et extérieur, donc peu d'évaporation. Il était également dit que l'eau « ruisselle sur le couvercle et pénètre entre couvercle et corps... ». Le travail était sérieux, ses résultats probants. Pourtant...

Le « mystère » a survécu

Malgré les faits, on continua à afficher un peu partout que la « Sainte Tombe n'a pas livré son secret » 2. Nombre de médias reprirent cette thèse du mystère, si bien que plus grand monde n'évoquait le travail des hydrologues. Et quand ils l'évoquaient, à l'image de l'émission Mystères de TF1 (1992), c'était pour prétendre que « les études menées jusqu'à présent laissent un petit peu à désirer ». Sans préciser en quoi, évidemment. Comme il fallait cependant expliquer la présence de l'eau, une hypothèse revint souvent à la surface...

Un vieux « Serpent de Mer » : l'hypothèse de la condensation

Cette hypothèse a été évoquée comme la solution à maintes reprises, et ce depuis fort longtemps. Dans un article de 1975-1976 3 consacré aux puits aériens, C. R. Cheveneau recensait quelques auteurs ayant proposé cette théorie pour expliquer l'eau du sarcophage. « C'est un capteur d'humidité atmosphérique à rendement élevé » (P. Basiaux, 1933) ; « L'opinion des autorités de l'abbaye est qu'il s'agit là d'un phénomène naturel, d'une condensation spontanée, qui s'expliquera tôt ou tard par la physique [...] le phénomène considéré comme miraculeux s'explique fort bien par la physique » (H. de Varigny, 1934) ; « On se trouve là en présence de circonstances exceptionnelles : exposition au Nord dans une cour profonde où ne pénètre pas le soleil, ensemble architectural environnant comportant des constructions massives formant probablement volant thermique et surtout bonne circulation de l'air chaud et humide déversé par-dessus la paroi Sud, se refroidissant au niveau du sol, dont l'humidité se condense dans la cuve du sarcophage » (René Colas, 1957) ; « Il admet la production d'eau par condensation de l'air mais reste quand même dubitatif ici » (Nicolas Chtechapov, 1960).

Un mystère dans le mystère : l'auvent fantôme

Le 27 juillet 1998, sous la plume de J. Vilaceque, le quotidien régional Midi Libre amenait une « information » étonnante dans le dossier du sarcophage : celui-ci était censé se trouver sous un auvent : « Il est là sous son auvent dans une courette à gauche de l'église, posé sur deux socles de pierre de 20 cm de haut ». Il était également précisé que le sarcophage se remplissait d'eau « tout seul. Sans que la pluie ne l'effleure... » ! Mieux, dans son livre Les dossiers scientifiques de l'étrange (Michel Lafon 1999, page 148), Yves Lignon reprenait l'information et ajoutait : « Le sarcophage est bien un sarcophage, pas une citerne ouverte à l'air libre : quand il pleut le monument est à l'abri ».

Un nouveau mystère dans le mystère ? Une visite déjà ancienne de l'un d'entre nous (H.B.) au site nous avait pourtant clairement montré un sarcophage... à l'air libre. Mais un auvent aurait pu être ajouté récemment et MM. Vilaceque et Lignon faire ainsi référence à... ce nouvel état des lieux. Afin de juger précisément de la crédibilité de ces deux messieurs, il nous fallait une information complémentaire. Suite à un fax à la paroisse Ste Marie d'Arles-sur-Tech le 16 mai 2001, le curé a eu la gentillesse de nous répondre rapidement puisque son fax nous parvint le 18 mai. Il y est dit : « Il n'y a jamais eu d'auvent placé au-dessus du sarcophage d'Arles ni avant ni après 1998 ». L'affaire est donc classée. Elle montre cependant comment peut se créer un mythe : le couple souvenir inexact et absence de vérification (pour le formuler gentiment) par un tenant du mystère est redoutablement efficace, et l'on peut parier que dans le futur, d'autres auteurs reprendront l'histoire de l'auvent fantôme.

La piste de la « paroi froide » n'est donc pas nouvelle. Elle fut privilégiée une dernière (?) fois - et présentée encore comme nouvelle - par M. Pomarede 4 en 1998 et Y. Lignon 5 en 1999.

Or, les auteurs de l'étude de 1961 n'excluaient évidemment pas cette hypothèse, mais avaient conclu qu'elle ne permettait pas la production d'une quantité d'eau suffisante pour expliquer le phénomène.

L'hypothèse de la condensation : incompatible avec les résultats d'expériences sur les puits aériens

Les puits aériens ont fait l'objet de plusieurs expériences et études. Le plus célèbre est sans doute celui de Trans-en-Provence, conçu en 1928 et terminé en 1931, grâce aux travaux de l'ingénieur belge Achille Knapen, lauréat de la Société des Ingénieurs Civils de France. L'ouvrage, aux dimensions imposantes (12 m de diamètre à la base, près de 13 m de haut, paroi de 2,5 m d'épaisseur percée d'orifices permettant la circulation d'air, 3 000 plaques d'ardoises afin d'augmenter la surface de condensation) ne put jamais concrétiser les espoirs de son créateur. La production espérée de 30 à 40 mètres-cube par jour ne vint jamais, les résultats des meilleures nuits s'arrêtant à quelques litres...
À la même période (1929), un essai fut réalisé à Montpellier-Bel-Air (Hérault) avec un autre type de récupérateur par condensation. C'est Léon Chaptal, directeur de la station de bioclimatologie agricole de Montpellier, qui mena ces travaux. L'ouvrage, une pyramide de pierres calcaires d'environ 13 mètres-cube érigée sur une base bétonnée, ne fournit que 0,2 à 0,5 litre par jour...

À partir de ces travaux, on pouvait « calculer » que le Sarcophage d'Arles-sur-Tech, avec son volume « global » inférieur à un mètre-cube ne pouvait se remplir uniquement ni même essentiellement par le phénomène de condensation.

La confirmation

Un article vient de paraître dans la revue scientifique internationale Atmospheric Research. C'est le résultat des recherches d'une équipe menée par D. Beysens, du Commissariat à l'Energie Atomique.

Après trois années de relevés, le résultat est sans ambiguïté ; la production d'eau est due au bilan global de trois phénomènes : eau de pluie, condensation et évaporation. La quantité d'eau issue de la condensation est six fois plus élevée que celle qui s'évapore, et la condensation produit en moyenne 10 % de l'eau présente dans le sarcophage : l'eau de pluie représente ainsi 90 % du phénomène.

Les trois hydrologues de 1961 n'étaient pas aussi « nuls » que certains voulaient le faire croire... Pour la science, le « mystère » est une nouvelle fois éclairci. Mais pour ceux qui ont la Foi, et quelques autres de mauvaise foi, nul doute que cette nouvelle étude ne suffira pas...
Cependant, les auteurs de cette nouvelle recherche portent une appréciation critique envers les résultats des trois hydrologues sur deux points :

  • ils supposent qu'au début des mesures du niveau d'eau dans le sarcophage effectuées en 1961, celui-ci était vide... Or, une lecture attentive du Rapport technique de 1961 permet de démontrer que ce n'était pas le cas. À partir de cette opinion (fausse), Beysens et al. remettent en question l'explication de la durée moyenne du décalage observé entre pluie et montée du niveau d'eau.
  • ils contestent le degré de porosité du couvercle (« nous pensons que le marbre peut être poreux sur une épaisseur de quelques millimètres [...] mais pas en son cœur »), oubliant que des expériences sur le sarcophage lui-même avaient permis d'attester cette porosité.

Suite à plusieurs courriers, les réponses de D. Beysens n'ont pas permis d'obtenir des arguments qui puissent étayer sérieusement les opinions des auteurs. Un dossier plus complet sur cet aspect de l'affaire sera bientôt disponible sur le serveur du Laboratoire de zététique.

Des travaux défendus depuis longtemps par le Laboratoire de Zététique et le Cercle Zététique du Languedoc-Roussillon

Le dossier du sarcophage d'Arles-sur-Tech et la solution datant de 1961 sont disponibles depuis longtemps. En effet, en réponse à l'émission Mystères de TF1 en 1992, un dossier explicitant la solution était publiquement accessible dès cette date sur le serveur universitaire Minitel 3615 ZET de l'université de Nice.

En 1996, avec l'ouverture de son site internet, le Cercle Zététique du Languedoc-Roussillon mettait en ligne une synthèse de ces éléments sur la base du dossier Minitel.

Début 2001, le site du Laboratoire universitaire de Zététique, Centre J. Theodor d'étude des phénomènes « paranormaux », reprenait et complétait le dossier, répondant notamment aux arguments critiques (et ridicules...) contre l'étude de 1961 et la nouvelle résurgence de l'hypothèse « paroi froide » comme explication du phénomène.

Nous sommes en droit d'espérer que, suite à cette claire confirmation de l'origine de l'eau qui remplit le sarcophage d'Arles-sur-Tech, nous puissions enfin voir une plaque (et entendre des médias) annonçant : « La sainte Tombe a livré son secret. Pluie et condensation ».

2/ Etude d'Henri Broch - Université de Nice-Sophia Antipolis - Laboratoire universitaire de Zététique

Arles sur Tech est une commune des Pyrénées-Orientales. Cette tombe est un vieux et lourd sarcophage en marbre qui se trouve à l'air libre dans une courette, au bas d'un mur d'une douzaine de mètre de haut (la cour n'est pas fermée du coté nord et donne sur une place). Le couvercle de ce sarcophage est aussi épais que les parois (environ 15 cm) et repose d'une façon imparfaite sur ces dernières. On peut même glisser les doigts dans l'interstice en plusieurs endroits. Le sarcophage ne repose pas directement sur le sol mais par l'intermédiaire de deux blocs de marbre.

Le phénomène "miraculeux" présenté par ce sarcophage est le suivant: Chaque jour, il semble se rassembler à l'intérieur du dit sarcophage une quantité d'eau assez importante (de l'ordre d'un litre en moyenne) quasiment "pure" et à laquelle on attribue des qualités curatives. On peut puiser l'eau par un petit trou situé sur un des petits côtés, à la jointure du sarcophage et de son couvercle, trou par lequel une petite pompe à siphon est introduite. Il arrive que "le sarcophage déborde". La production aurait même atteint quelquefois 800 litres par an... Il n'y a apparemment aucune supercherie, aucune tuyauterie, aucun remplissage extérieur...

Alors, miracle ? Mystère irrésolu comme l'a prétendu une émission de TF1 ? L'émission (diffusée en 1993) a présenté l'enquête faite il y a une trentaine d'années par des hydrologues...pour conclure, in fine, que "les études menées jusqu'à présent...laissent une petit peu à désirer" et que " la Sainte Tombe ne livre pas son secret". Contrairement à ce qui a été affirmé explicitement dans l'émission et dans différents écrits, l'enquête menée il y a une trentaine d'années par des scientifiques a permis de conclure de manière très nette.Ce sont les résultats de ces hydrologues - MM Perard, Honoré et Leborgne - que nous portons à votre connaissance par de larges emprunts pour un résumé de la publication d'origine.

L'enquête menée s'est faite avec l'accord et la collaboration du curé d'Arles sur Tech, qui a mis les clefs pour ouvrir l'enceinte dans laquelle se trouve le sarcophage, à la disposition des chercheurs ( et avec la collaboration de Mr Rougé, instituteur en retraite). Durant l'année 1961, pendant deux mois et demi -une seule interruption pour Pâques en raison des visites de fidèles et touristes- des mesures, observations et expériences ont pu être effectuées selon un programme établi à l'avance.

Les hypothèses qui avaient pu être émises a priori étaient:

  • Condensation de l'eau contenue dans l'air pendant les heures chaudes de la journée (cad quand la température des parois du sarcophage est inférieure à celle de l'air ambiant).
  • Remontée capillaire par l'intermédiaire des dès (les "cales").
  • Phénomène de rosée (refroidissement du sarcophage pendant la nuit par suite du rayonnement, avec abaissement de la température des couches d'air voisines et dépôt de gouttelettes d'eau).
  • En complément de ces hypothèses, traversée possible du couvercle par l'eau condensée (et l'eau de pluie ?) par effet de capillarité et gravité.

Le sarcophage reste d'aspect sec et la température à l'intérieur est supérieure de 2 à 3 degrés à celle de la paroi externe et non sur la face interne du couvercle.

Les mesures effectuées ont porté sur:

  • L'humidité (hygromètre enregistreur placé à coté du thermomètre).
  • La direction et la force du vent.
  • La pluviométrie.
  • La température (thermomètre enregistreur placé à proximité du sarcophage, bande relevée toutes les semaines).
  • Le niveau de l'eau dans le sarcophage (niveau repéré, sur une réglette graduée, dans un tube relié par un siphon à l'intérieur du sarcophage).

Les expériences faites sur place (d'autres expériences ont été faites en laboratoire):

  • Masticage du pourtour du couvercle de façon à savoir si l'eau venait uniquement de l'air qui peut circuler dans le sarcophage.
  • Pose d'une housse en nylon sur le couvercle avec un espace de 5 cm laissé pour permettre une circulation d'air.

De façon à rendre les résultats plus significatifs, chaque expérience a été faite pendant au moins une semaine et a été précédée et suivie d'une semaine sans expériences.

Courbes de températures régulières :T° minimale vers 6h du matin, valeur 5 à 6° en mars, un peu plus élevée en avril. Maximum à 14h n'ayant jamais dépassé 19° centigrade. Variation journalière moyenne d'une dizaine de degrés.

Courbes d'humidité relative irrégulières, de 50 % certains jours à 80 % d'autres. Minimum vers 14H et maximum vers 6H. Valeurs très faibles en présence de tramontane.

En résumé, deux mois sans pluie, deux mois sans variation du niveau d'eau dans le sarcophage (excepté la baisse due aux prélèvements de M. le curé). Ce 1er résultat-constatation est très important. Il montre "qu'il ne se produit pas 1 à 2 litres d'eau chaque jour, et la production n'est donc absolument pas continue, ce qui aurait pu être vérifié depuis fort longtemps".

Le 10 avril, il tombe 5,5 mm d'eau: Le lendemain 6,9 mm... et le surlendemain le niveau d'eau du sarcophage a bougé et s'est élevé d'environ 1 mm. Ce relevé et ceux des jours qui suivent jusqu'au 23 avril sont donnés sur un tableau transcrit sous forme de courbes. Le graphique (hauteurs de pluie cumulées, variation du niveau d'eau dans le sarcophage et transformée de la courbe de niveau dans le sarcophage) montrent de manière très claire que le sarcophage profite de la pluie pour se remplir. Les hydrologues -leurs arguments étant étayés par d'autres éléments que les simples tracés précédents en sont arrivés à conclure que l'eau met en moyenne cinq jours pour traverser le couvercle et qu'un tiers de l'eau de pluie est récupérée en moyenne dans le sarcophage. Un coup d'oeil indiscret à l'intérieur du sarcophage par les petits interstices disponibles avait d'ailleurs déjà montré la présence de grosses gouttes d'eau rassemblées en quelques endroits du couvercle (la pluie précédant cette observation datant de 20 jours avant, cela montre que l'écoulement de toute l'eau peut être assez long comparé à la moyenne). De l'eau versée goutte à goutte sur le couvercle du sarcophage disparaissait presque immédiatement en humidifiant un cercle de plus en plus grand, et bien que la surface du couvercle soit très en pente, le cercle mouillé avait son centre exactement au point d'impact de la goutte. Certaines zones du couvercle sont plus poreuses que d'autres. Sa surface est irrégulière et présente notamment des petits trous hémisphériques de 1 à 2 mm de diamètre qui, une fois remplis, se vident en 45 secondes environ.

Symbiose du naturel et du surnaturel ?